[Projet Sylphe]
Une païenne dans la ville, une païenne dans la fac.
Nous avons décidé de nous pencher cette fois sur les liens entre notre environnement et notre pratique, ainsi que sur l'impact que notre travail a sur elle.
C'est parti pour ma deuxième participation au projet !
C'est parti pour ma deuxième participation au projet !
"Ici commence le court bonheur de ma vie; ici viennent les paisibles mais rapides moments qui m'ont donné le droit de dire que j'ai vécu. Moments précieux et si regrettés! ah! recommencez pour moi votre aimable cours; coulez plus lentement dans mon souvenir, s'il est possible, que vous ne fîtes réellement dans votre fugitive succession."
Voilà les mots que dit Jean-Jacques Rousseau à propos de Chambéry. Si j'ai de nombreux désaccords avec ce philosophe, je dois admettre que cette phrase fait raisonner un bourdon au clocher de ma nostalgie.1 La présence du début de cette phrase écrite en énorme à l'entrée de la ville n'y est pas étrangère !
D'abord, quand on commence à connaître quelqu'un, il y a certaines choses qu'on se sent obligé de lui dire, des choses qui font parti de nous, de notre histoire. Chez moi, c'est les endroits où j'ai vécu.
Ma mère m'a porté en Chine et a accouché en France, mais c'est bien la Chine qui a vu mes toutes premières fois. J'ai ensuite vécu au Maroc jusqu'à mes huit ans. Là-bas sont mes premiers souvenirs, et les meilleurs moments de mon enfance. j'ai ensuite aménagé pour de vrai en France. Mes parents sont français (mais plusieurs origines de divers pays sont présentes).
Ainsi, en France j'étais sensé me sentir chez moi. Et ma famille n'a jamais comprit pourquoi ce n'était pas le cas. Pour eux, le pays de mon passeport est plus important que le pays de mes premiers souvenirs.
J'ai tout de même continué mon petit bonhomme de chemin. Mes croyances se sont peaufinées avec le temps (et continuent encore !). A quinze ans, j'avais besoin de quitter ma campagne savoisienne, de quitter mon collège d'abrutis et de repartir, même si c'était pas loin. Je suis donc allée en Internat à Chambéry.
Comme Rousseau, ce fut mes meilleurs années de ma vie. C'est la que j'ai vraiment comprit que l'air pouvait se respirer et que j'étais assez grande pour profiter des couleurs.
Puis je suis partie à la fac.
Et c'est ici que le sujet commence vraiment.
Je suis partie habiter à Lyon, tout au bout d'une rue, à côté des chemins de fer et dans un quartier pas franchement rassurant. J'étais dans une coloc avec deux personnes que je ne connaissais pas. Mon autel n'était que quelques centimètres d'une étagère. Je n'osais pas pratiquer. Pour plein d'autres raisons (je détestais habiter à Lyon), ça a été une année assez éprouvante et ma pratique n'y a pas échappé.
Maintenant, je suis revenue à Chambéry.
Voilà les mots que dit Jean-Jacques Rousseau à propos de Chambéry. Si j'ai de nombreux désaccords avec ce philosophe, je dois admettre que cette phrase fait raisonner un bourdon au clocher de ma nostalgie.1 La présence du début de cette phrase écrite en énorme à l'entrée de la ville n'y est pas étrangère !
D'abord, quand on commence à connaître quelqu'un, il y a certaines choses qu'on se sent obligé de lui dire, des choses qui font parti de nous, de notre histoire. Chez moi, c'est les endroits où j'ai vécu.
Ma mère m'a porté en Chine et a accouché en France, mais c'est bien la Chine qui a vu mes toutes premières fois. J'ai ensuite vécu au Maroc jusqu'à mes huit ans. Là-bas sont mes premiers souvenirs, et les meilleurs moments de mon enfance. j'ai ensuite aménagé pour de vrai en France. Mes parents sont français (mais plusieurs origines de divers pays sont présentes).
Ainsi, en France j'étais sensé me sentir chez moi. Et ma famille n'a jamais comprit pourquoi ce n'était pas le cas. Pour eux, le pays de mon passeport est plus important que le pays de mes premiers souvenirs.
J'ai tout de même continué mon petit bonhomme de chemin. Mes croyances se sont peaufinées avec le temps (et continuent encore !). A quinze ans, j'avais besoin de quitter ma campagne savoisienne, de quitter mon collège d'abrutis et de repartir, même si c'était pas loin. Je suis donc allée en Internat à Chambéry.
Comme Rousseau, ce fut mes meilleurs années de ma vie. C'est la que j'ai vraiment comprit que l'air pouvait se respirer et que j'étais assez grande pour profiter des couleurs.
Puis je suis partie à la fac.
Et c'est ici que le sujet commence vraiment.
Je suis partie habiter à Lyon, tout au bout d'une rue, à côté des chemins de fer et dans un quartier pas franchement rassurant. J'étais dans une coloc avec deux personnes que je ne connaissais pas. Mon autel n'était que quelques centimètres d'une étagère. Je n'osais pas pratiquer. Pour plein d'autres raisons (je détestais habiter à Lyon), ça a été une année assez éprouvante et ma pratique n'y a pas échappé.
Maintenant, je suis revenue à Chambéry.
Et même si mon appart est tout petit, que la petite famille se marche dessus, je m'en fous. Vous comprenez pas ? JE SUIS A CHAMBÉRY ! Je remercie ma chance tous les jours pour ça.
J'habite dans la vieille ville, à deux pas des deux théâtres, je sors de chez moi et je peux promener ma main sur les vieux murs usés en me demandant combien de gens les ont touchés depuis leur construction.
Je peux apercevoir à chaque coin de rue, dans chaque traboule, des vestiges des temps passés. Je vois des anneaux à attacher les chevaux, des heurtoirs en forme de main, des portes en bois tellement vieilles que tu te demande comment elles tiennent encore debout, des inscriptions taillées dans la roches datant du XIIIème siècle, la vieille cathédrale (j'ai beau être païenne, cet édifice est le seul édifice chrétien que je trouve chaleureux), le château des ducs, les quelques gargouilles qui subsistent, les immeubles chancelants et tellement étranges que je crois sincèrement que les architectes du Moyen-âge étaient tous bourrés au boulot...
Je vois la mousse et les p'tites plantes qui reprennent lentement leurs droits sur les fissures de ces murs qu'elles connaissent depuis des siècles. Je sens les esprits des marécages glisser à travers la pierre. Je vois des enfants qui marchent dans les mêmes pas que l'ombre d'une laitière de 500 ans, sur les mêmes pavés. J'imagine le nombre de personnes qui ont vécu dans mon appart. Et quand je met ma cape de médiéviste, je me sens à ma place.
Et puis je vois aussi mes punks-à-chiens, mes métaleux et hippies qui traînent devant Rock-av', mon si vieux lycée et ses catacombes, le clochard aux yeux bleus de la gare, et celui qui a plus de dents, et celui qui fait un peu peur, et celle qui s'allonge sur les graviers en plein cagnard pour faire peur aux gamins, mon cher Verney et la musique qui s'en échappe, le couple qui joue du Hang pendant l'été, les vendeurs de châtaignes, la médiathèque...
C'est toutes ces choses qui font que je suis heureuse dans cette ville, malgré ces défauts.
J'habite dans la vieille ville, à deux pas des deux théâtres, je sors de chez moi et je peux promener ma main sur les vieux murs usés en me demandant combien de gens les ont touchés depuis leur construction.
Je peux apercevoir à chaque coin de rue, dans chaque traboule, des vestiges des temps passés. Je vois des anneaux à attacher les chevaux, des heurtoirs en forme de main, des portes en bois tellement vieilles que tu te demande comment elles tiennent encore debout, des inscriptions taillées dans la roches datant du XIIIème siècle, la vieille cathédrale (j'ai beau être païenne, cet édifice est le seul édifice chrétien que je trouve chaleureux), le château des ducs, les quelques gargouilles qui subsistent, les immeubles chancelants et tellement étranges que je crois sincèrement que les architectes du Moyen-âge étaient tous bourrés au boulot...
Je vois la mousse et les p'tites plantes qui reprennent lentement leurs droits sur les fissures de ces murs qu'elles connaissent depuis des siècles. Je sens les esprits des marécages glisser à travers la pierre. Je vois des enfants qui marchent dans les mêmes pas que l'ombre d'une laitière de 500 ans, sur les mêmes pavés. J'imagine le nombre de personnes qui ont vécu dans mon appart. Et quand je met ma cape de médiéviste, je me sens à ma place.
Et puis je vois aussi mes punks-à-chiens, mes métaleux et hippies qui traînent devant Rock-av', mon si vieux lycée et ses catacombes, le clochard aux yeux bleus de la gare, et celui qui a plus de dents, et celui qui fait un peu peur, et celle qui s'allonge sur les graviers en plein cagnard pour faire peur aux gamins, mon cher Verney et la musique qui s'en échappe, le couple qui joue du Hang pendant l'été, les vendeurs de châtaignes, la médiathèque...
C'est toutes ces choses qui font que je suis heureuse dans cette ville, malgré ces défauts.
Alors vous vous imaginez bien que dans ce contexte, ma pratique, je la sens renaître. J'ai plus pratiqué en quatre mois qu'en trois ans. Je porte fièrement mes "signes religieux ostentatoires" et je fais claquer ma cape dans chaque traboule sombre. Je suis sûrement la réincarnation du professeur Snape.
J'ai même un énorme meuble dédié à mon autel et ma pratique !
En plus de tout ça, ma fac est située dans les hauteurs, à 15 min à pieds (contrairement à l'heure et demi dans les tramways bondés de Lyon), et elle est entourée par les champs, des bois, et pleiiiins de marches qui cassent les genoux. Je peux donc remercier à voix basse la nature dans laquelle je marche tous les jours.
Maintenant, je suis étudiante. En première année (ah, changer de filière...), dans une nouvelle fac, sans connaître personne dans ma promotion. Donc je vais pas non plus crier sur tout les toits ma religion. Mais je ne la cache pas non plus.
L'année passée, j'ai travaillé sur l'apprentissage en école catholique, parce que je voulais quelque chose de différent de moi. Et puis je me suis dis, pourquoi je ferais pas l'"inverse" maintenant ? J'ai donc travaillé sur le paganisme en France. Je pensais que je pourrais enfin contenter ma solitude sur mon projet, mais à ma grande surprise, un petit groupe c'est joint à moi. Une passionnée de littérature scandinave, un berbère kabyle, et la copine d'un facho-païen. A nous quatre, ça faisait un échantillon atypique de la visibilité du paganisme en France !
Maintenant, je met ça de côté. Je n'ai rien à prouver à mes camarades, et inconsciemment, c'était le but de mon sujet. Je ne travaillerais plus sur le paganisme avant un moment, histoire de pouvoir prendre du recul. Mais parfois, je parle de religion avec les filles de ma classe, et elles sont assez tolérante. Je n'ai encore reçu aucune remarque négative.
Mais en tant que future psychologue, mon but est de poser une claire limite entre paganisme et science. Je sais qu'on peut entre-couper les deux, mais je ne me sens pas prête à aller sur ce terrain. Je n'aborderais le paganisme que si un patient est païen et à la tête sur les épaules pour prendre suffisamment de recul entre les pièges de l'esprit et la réalité, ou si un sujet de recherche à l'air assez intéressant à ce sujet.
Pour conclure, si mon statut d'étudiant me permet de vivre comme je l'entends avec mes croyances, mon environnement m'a beaucoup influencé. La campagne, c'était génial niveau spirituel, mais ça manquait d'humains. Lyon, c'était trop d'humains et pas assez de sacré, de souffle. Je ne sais pas si c'est l'idéal païen, mais pour moi Chambéry, c'est le juste milieu.
Les esprits d'ici, je les perçoit, et son aspect vieille-ville moderne entourée par les montagnes et le lac m'aide à rassembler au même endroit tout ce qui fait ma personnalité.
J'ai trouvé mon petit coin de sorcière au fond d'une traboule, les bois d'un côté et le kébab de l'autre, et ça me va très bien :)
J'ai même un énorme meuble dédié à mon autel et ma pratique !
En plus de tout ça, ma fac est située dans les hauteurs, à 15 min à pieds (contrairement à l'heure et demi dans les tramways bondés de Lyon), et elle est entourée par les champs, des bois, et pleiiiins de marches qui cassent les genoux. Je peux donc remercier à voix basse la nature dans laquelle je marche tous les jours.
Maintenant, je suis étudiante. En première année (ah, changer de filière...), dans une nouvelle fac, sans connaître personne dans ma promotion. Donc je vais pas non plus crier sur tout les toits ma religion. Mais je ne la cache pas non plus.
L'année passée, j'ai travaillé sur l'apprentissage en école catholique, parce que je voulais quelque chose de différent de moi. Et puis je me suis dis, pourquoi je ferais pas l'"inverse" maintenant ? J'ai donc travaillé sur le paganisme en France. Je pensais que je pourrais enfin contenter ma solitude sur mon projet, mais à ma grande surprise, un petit groupe c'est joint à moi. Une passionnée de littérature scandinave, un berbère kabyle, et la copine d'un facho-païen. A nous quatre, ça faisait un échantillon atypique de la visibilité du paganisme en France !
Maintenant, je met ça de côté. Je n'ai rien à prouver à mes camarades, et inconsciemment, c'était le but de mon sujet. Je ne travaillerais plus sur le paganisme avant un moment, histoire de pouvoir prendre du recul. Mais parfois, je parle de religion avec les filles de ma classe, et elles sont assez tolérante. Je n'ai encore reçu aucune remarque négative.
Mais en tant que future psychologue, mon but est de poser une claire limite entre paganisme et science. Je sais qu'on peut entre-couper les deux, mais je ne me sens pas prête à aller sur ce terrain. Je n'aborderais le paganisme que si un patient est païen et à la tête sur les épaules pour prendre suffisamment de recul entre les pièges de l'esprit et la réalité, ou si un sujet de recherche à l'air assez intéressant à ce sujet.
Pour conclure, si mon statut d'étudiant me permet de vivre comme je l'entends avec mes croyances, mon environnement m'a beaucoup influencé. La campagne, c'était génial niveau spirituel, mais ça manquait d'humains. Lyon, c'était trop d'humains et pas assez de sacré, de souffle. Je ne sais pas si c'est l'idéal païen, mais pour moi Chambéry, c'est le juste milieu.
Les esprits d'ici, je les perçoit, et son aspect vieille-ville moderne entourée par les montagnes et le lac m'aide à rassembler au même endroit tout ce qui fait ma personnalité.
J'ai trouvé mon petit coin de sorcière au fond d'une traboule, les bois d'un côté et le kébab de l'autre, et ça me va très bien :)
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Crédits photos sous chaque image. (un jour je chargerais mon appareil.)
Titre extrait des Confessions (Livre VI), Jean-Jacques Rousseau.
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